Poussé par ce besoin si essentiel à l’écrivain, et plus encore peut-être au romancier, de reprendre contact avec la réalité, l’auteur de Tanguy se penche sur son passé particulièrement chargé de drames et de tourments. Le parent éloigné, qui l’a recueilli quand il avait douze ans, l’envoie, pour une peccadille, en maison de correction. C’est donc l’expérience de quatre années d’adolescence passées — jusqu’à l’évasion finale — dans un bagne d’enfants que nous retracent ces mémoires au ton précis et à la sincérité pathétique : épreuves de force, humiliations, brutalités et cruelles intrigues propres aux pénitenciers ; amitiés, haines et passions forcenées entre garçons — passions d’autant plus violentes qu’elles restent le plus souvent chastes —, portraits des jeunes compagnons et portraits des maîtres, les uns grotesques, les autres sadiques, d’autres généreux (le pénitencier est tenu par des religieux), tout cela fournit à Michel del Castillo la riche et douloureuse matière de ces pages où s’allient la verve vivace d’un roman picaresque et la brûlante exigence d’une confession.