Naître, c’est parler. Ce livre se compose de dix chapitres qui sont chacun une confidence, un délire, une parlerie, la parlerie d’un homme pris de boisson et qui trouverait grâce à l’excès d’alcool absorbé ces moments de froide lucidité qu’on appelle aussi la griserie. Les circonstances de son déchirement sont banales ; invité par des amis à une soirée, il y boit plus que de raison et, contraint à s’allonger dans une chambre voisine, il éprouve le besoin de commenter les dérisoires péripéties d’une vie en déroute, par un discours titubant et irrépressible. La double ivresse de la parole et de l’alcool lui communique la plus froide lucidité en même temps qu’elle le prive des moyens d’en faire usage. Réduit par la griserie à l’inaction d’un corps né une première fois pour rien, le gisant ne peut plus que se parler, que s’écrire. Et cette écriture consomme son impuissance à vivre, tout en constituant une seconde naissance par les mots qui sont le ressassement de cette démarche à la fois délibérée et haïe. La coulée de ce récit qui est à la fois un chant d’amour, de détresse et de mort, veut se charger de tous les prestiges de l’improvisation en simulant les faux progrès de la parole. A l’issue de cette fièvre, l’aube lui apporte une délivrance provisoire.