Les mots pour dire ce que l'on n'a pas eu le temps dire...
La maladie éprouve moins l'amour que l'amour n'éprouve la maladie. L'amour est le fil rouge qui conduit ce récit. Le récit d'une mise à mort. Celle de la maladie. Une mygale qui s'est infiltrée dans ton cerveau, Papa, un soir d'automne. Un poison sournois qui a recouvert de noir toutes les couleurs sur son passage. Sauf celles de l'amour. Pendant un an, tu as trompé la maladie sans l'anéantir. Pendant un an, il nous manquait les mots, impuissants face à l'indescriptible. Les mots qui expriment la colère, qui fustigent la maladie, qui traduisent la tristesse. Et puis soudain, j'ai écrit. Soudain, les mots sauvent, apaisent la reviviscence des souvenirs, réconcilient avec la douleur. Face aux maux de la maladie indicible, les mots de l'amour ineffable.
Un cri d'amour pour éteindre la révolte.
Laissez-vous toucher par le récit poignant et plein d'optimisme d'une jeune femme s'adressant à son père, atteint d'une tumeur.
EXTRAIT
Tu parcours la lecture de ces mots avec émotion. Je reconnais ton visage près du sanglot. Je connais tes traits par cœur. Je connais l’œil pétillant et rieur annonciateur d’un fou rire, je connais tes sourcils poivre et sel froncés quand tu es proche de l’expression de la colère contenue, et je connais ce visage dont le menton tremble, dont les lèvres se pincent comme pour en retenir le souffle qui risquerait de s’échapper et te trahir. Tes yeux s’humidifient mais tu n’aimes pas pleurer. Tu n’aimes pas pleurer devant nous. Tu es ému par les mots, tu ne sais pas toujours les exprimer, mais tu sais bien les écrire.
Deux ans auparavant, nous avions fêté tes 53 ans dans un restaurant parisien, et à la fin du repas, tu avais saisi ton téléphone afin d’y écrire quelque chose. J’ai pensé que tu répondais aux nombreux messages de vœux qui t’avaient été envoyés, mais non, le message que tu rédigeais nous était destiné. Tu avais écrit Je vous aime dans une note, et avait passé ton téléphone à Maman, afin qu’elle le lise, puis qu’elle nous le donne, comme une ronde et un relais d’amour.
Il n’y a pas d’amour, il n’y a que des preuves d’amour. C’est à mon tour de t’exprimer le mien. Je ne veux pas que tu m’abandonnes, et tu ne souhaites pas m’abandonner non plus. Nous fêtons tes 55 ans, ton dernier anniversaire. Toi qui aimes la symétrie, tu es servi. Cette bougie que tu souffles, nous l’allumerons bientôt en ta mémoire.
À PROPOS DE L'AUTEUR
Sophie Moreau a 25 ans.Elle a effectué des études de droit et de philosophie à la Sorbonne et l'Université Panthéon-Assas; un M1 de droit pénal et un M2 de philosophie du droit et droit politique, et elle est actuellement éducatrice dans le champ de la Protection de l'Enfance.
Elle travaille également depuis plusieurs années dans un théâtre. Elle est passionnée par l'art sous toutes ses formes : musique : 10 ans de piano, écriture : lauréate de 2 concours de littérature, chant... L'art est une seconde nature pour elle.