Un très grand nombre de rues, en France et dans le monde, portent le nom de l’abbé de L’Épée : né au tout début du XVIIIe siècle, dans les dernières années du règne de Louis XIV, ce prêtre janséniste est un personnage fondamental de l’histoire internationale des “Sourds et Muets”. Lié au mouvement des Lumières par Condillac et par le projet d’une langue universelle, l’abbé de L’Épée fut également un polémiste et un pédagogue d’exception. L’intelligence qu’il déploya pour comprendre le problème de la surdi-mutité – grâce à la rencontre extraordinaire de deux jumelles “sourdes et muettes” qui communiquaient entre elles par signes –, la persévérance dont il fit montre pour délivrer les sourds-muets de leur enfermement psychologique et social restent remarquables. C’est aussi lui qui fonda la première école gratuite pour sourds, où il appliqua une conception nouvelle de la « langue des signes », tout en humanisant en profondeur le rapport de la société à ces personnes exclues, mises à l’écart ou internées. Au terme d’une longue existence rudement éprouvée sur le terrain, entièrement attachée à soulager l’infortune de ses contemporains, l’abbé de L’Épée meurt à la fin de 1789, dans les premiers mois de la Révolution.