Le 9 janvier 1836. Il est neuf heures moins le quart et Lacenaire arrive à la barrière Saint-Jacques. La machine est en place depuis une heure du matin. Une simple machine composée de deux montants élevés sur des madriers posés en croix sur le sol. Entre les deux montants, engagés dans un rail, une pièce mobile : la lame triangulaire qui sert à trancher la tête des condamnés à mort de droit commun en France. — Adieu, mon vieux Lacenaire ! Du courage ! Le premier, Pierre-Victor Avril a gravi les degrés de l’échafaud. En vain, on tente de dissimuler la scène à Lacenaire. Il fait face aux bois de justice et voit tomber la tête d’Avril dans le panier. La même angoisse qu’il a déjà décrite dans l’ombre de son cachot l’envahit : « Je me suis souvent posé cette question qui me paraissait oiseuse : “A qui ai-je adressé ma première parole en naissant ; à qui adresserai-je mon dernier mot en mourant ?” » — Je n’ai pas peur ! Je n’ai pas peur ! Le couperet tombe une seconde fois. Lacenaire, perdu pour la société, la conquiert comme écrivain. « J’arrive à la mort par une mauvaise route, j’y monte par un escalier. »