« Comme ils sont heureux ceux qui, dès leur enfance, décident de devenir cuisinier, acteur, général et finissent cuisinier, acteur, général. A Carpentras où je passai mon enfance, à Aix-en-Provence où je fis mes études, à Barcelone où je terminai ma licence d’espagnol, à Grenade où je perfectionnai, comme on dit, mon accent, je n’oubliais jamais que j’avais été mis au monde pour ouvrir une maison de rendez-vous. En attendant mieux, je devins professeur, puis journaliste. Fataliste, j’espère encore ouvrir une maison de rendez-vous à Alexandrie en compagnie de ma chère Cléopâtre, de ma chère Messaline et de mon cher Héliogabale... » Cette maison de rendez-vous que Jean Chalon rêve depuis toujours d’ouvrir ressemble plus à une allègre abbaye de Thélème qu’aux mornes salons d’une quelconque Madame A... ou B... ou... Les amateurs de belles filles en fourrure, d’attractions avec jumeaux incestueux, de pastèques consommées à la façon andalouse et autres délices pures y trouveront de quoi satisfaire tous leurs appétits. Ouvrir une telle maison de rendez-vous, c’est rétablir l’éminente dignité de la prostitution telle qu’on la pratiquait autrefois à Babylone sous le triple regard bienveillant du peuple, du pouvoir et du Dieu.