Un Breton bien tranquille se présente comme un récit ordonné, où défilent personnages et paysages. La formule du titre n’est pas une affirmation, mais une hypothèse humoristique. A vous, après lecture, de juger. Une vie qui débute par la guerre de 14 et par la mort du père pourra-t-elle jamais être calme ? Admirateur de Balzac, Henri Queffélec avait pensé appeler son livre Les Illusions maintenues. Tel il était venu à Paris de son Brest natal, tel en profondeur il s’estime resté. Le gamin de la côte, l’enfant qui réclamait des histoires à sa grand-mère maternelle, n’avait pas été trahi par l’étudiant du Quartier latin. Ni par l’homme qui gagnait la Suède. Sous l’occupation allemande, abandonnait le professorat, emmagasinait des manuscrits. Après la guerre, entrait au Comité Directeur de la revue Esprit. Retrouvait plus tard les routes de l’Océan et les navires... Des critiques ont voulu distinguer dans une œuvre nombreuse des aspirations différentes, mieux vaut en souligner l’unité. On ne s’écarte jamais d’un sillage. Ainsi en va-t-il des tempéraments celtes. C’est en ce sens qu’il faut lire le titre : Un Breton bien tranquille. Dans la mesure où on l’admet comme sérieux, « tranquille » peut vouloir dire fidèle. Car les bourrasques et les deuils n’ont pas manqué. On est loin du casanier ! Chrétien et sportif, l’auteur admire la vie, principe physique et spirituel et il admire le cosmos. Il refuse — contre Pascal — que le malheur des hommes vienne de ne pouvoir se tenir entre les murs d’une pièce. Et quelle merveille de songer aux joies qu’apportent aux siens le voyage et la découverte. La musique, la mathématique, les terres et les mers. Au Musée imaginaire selon Malraux, nourri par les photographies d’œuvres d’art, il faut adjoindre le musée constamment renouvelé des paysages que l’homme parcourt et contemple. Avec toutes les rencontres, toutes les amitiés — individus, peuples et sciences — qui naissent du même coup.