Cromwell, les niveleurs et la République

Au temps où Cromwell, général et régicide, fondait la République d’Angleterre, une dépêche évoquait chez nous ses rivaux, ces démocrates d’avant-garde : "... les Niveleurs", dont on parle toujours... En effet l’on découvre ici ce que fut un premier "parti" politique en Occident, à travers les manifestes, à nouveau diffusés en traduction, de ses leaders : trois, quatre, voire cinq "mousquetaires" révolutionnaires. Ecoutons-les, propagandistes à Londres, agitateurs dans l’Armée, réclamant changement et justice en des Débats fameux (que la sténographie nous a miraculeusement conservés) ; ou encore offrant, par delà les cris de détresse des pauvres ruraux et urbains, un solide programme socialiste ; et par eux fut rédigée (pour un 1er mai... 1649) la première constitution démocratique et parlementaire, définissant, au nom des Droits de l’Homme, déjà le Contrat politique et social. Jésus y rencontre Spartacus ; Rousseau puis Jaurès y découvriraient leurs ancêtres... Un instant influent à Bordeaux vers la fin de la Fronde, ce mouvement allait trouver un écho lors de l’indépendance américaine, puis dans les craintes de Louis XVI ou les rivalités s’opposant à Bonaparte, et apparut curieusement exemplaire aux réformateurs russes dès avant 1917. Cet idéal, que l’on croirait être d’aujourd’hui, fut très tôt jugé, en mal ou en bien : "... une ridicule chimère de gouvernement...", "une égale distribution de propriétés et de pouvoir"... C’était, on le voit, une affaire à suivre.