Le monde m’arrive à travers cet étrange hublot aux coins arrondis que découpe le faisceau de la projectionneuse sur un écran de cinéma. Thierry apparaît. (Attention, ça va commencer.) Il s’embarque sur le Poisson d’argent et s’enfonce dans ma mémoire : mille et une fois, notre héros va risquer que son film se casse. (En cas de blanc, les spectateurs sifflent.) Thierry défiera les terribles albinos, Laurel et Hardy, et l’impitoyable Baxter, alias Basseterre. Il se laissera séduire par l’ange Caméra, la capiteuse Madelyn Mozrow, et le satanique docteur Farlok. (Chut au balcon, mon âme est en jeu.) Mais parviendra-t-il à échapper à ces acteurs dégrimés, à ces dessins passés, à ces stars qui s’évadent chaque nuit de tous les films du monde pour venir vivre mes histoires ? Cinéma, cinématographe, cinoche, tout est cinénous. A mon père qui me lance : « C’est du cinéma tout ça », je réponds : « Je suis un cinéma. »