Le 31 juillet 1972, quatre-vingt-douze motos descendent les Champs-Elysées dans un bruit d'enfer. C'est le départ du premier Raid Orion, Paris-Ispahan, organisé par la Guilde Européenne du Raid et le journal Moto-revue. Le lundi 14 août, soixante-dix-neuf motos arrivaient à Ispahan. Le Raid était fini. Pourtant, onze motos ont continué sur Kaboul, quatre sont allées jusqu'à Rawalpindi. Quand octobre est arrivé, tout le monde était rentré, à l'exception de trois motos, qui continuaient à se promener en Cappadoce. Quand je suis revenue à Paris, le vendredi 13 octobre, sur ma 750 Guzzi (trois cents kilos, avec les bagages), le monde était devenu immense, et moi, j'étais toute petite (sans parler des cinq kilos que j'avais perdus). Je n'essaie pas de raconter le Raid Orion, ni de faire le trente-troisième guide touristique des pays que j'ai traversés. Ce n'est pas un livre de moto non plus : j'ai fait vingt mille kilomètres, à peu près, mais je conduis toujours aussi mal. Je voudrais simplement vous faire sentir ce que j'ai senti, et vous faire vivre ce que j'ai vécu. Pourquoi ? Parce que, pendant les deux mois et demi qu'a duré mon voyage, je n'ai pas connu une seule seconde d'indifférence, ni d'ennui. Et ça, c'est important.