On en revient toujours au miracle. À tous les miracles. Miller ne cesse de le répéter. Il « n'a pas honte » de se répéter, de tout répéter. Chaque livre est écrit pour traquer ces instants qui ont fait que sa vie a été différente, unique, mystérieuse. Miraculeuse. Le miracle, pour le fils du tailleur de Brooklyn, fut de réaliser son rêve : devenir écrivain. Un écrivain, qui s'est donné pour tâche de parler de l'homme qu'il était avant de devenir écrivain. Les rues, les livres, les femmes — tout dire. Dire tout ce qui l'a conduit, un matin d'automne, à quitter le seul emploi stable qu'il ait occupé dans sa vie, et à se jurer : « Je serai écrivain ou je crèverai de faim. » Il avait trente-trois ans. Pour lui, c'était comme dire : « Je serai un saint, un martyr, un dieu. »Béatrice Commengé, écrivain, est également la traductrice d'Anaïs Nin. Elle a publié deux romans, ainsi qu'un essai sur Nietzsche. « Je suis heureux que vous vouliez écrire sur moi un livre plus "imaginaire" que "savant". Je fais confiance à votre intuition. » Henry Miller (lettre à l'auteur, juin 1976). « On s'est régalés, hier, de parler de Miller avec Béatrice. Elle était là, son visage aigu de fouine avait l'air d'avoir fouillé plus loin et plus profond que quiconque dans la galaxie Miller. » Joseph Delteil (lettre à Henry Miller, février 1977).