La « question sociale » est de nouveau à l'ordre du jour. Mais cette « question » renvoie-t-elle à des faits, ou n'est-elle qu'une construction au service du discours des experts et du jeu politique ? D'une part, en effet, elle suggère un appauvrissement, alors qu'elle apparaît dans un contexte d'accroissement des richesses, lequel s'accompagne d'une inégalité dans leur répartition. Cette inégalité fait craindre à ses bénéficiaires la révolte des exclus du système : en ce sens, la question sociale est moins un problème posé par les pauvres qu'une préoccupation exprimée par les riches. D'autre part, il est à craindre que la clarification nécessaire ne vienne pas du débat dont cette question, mobilisée à la fois par la droite et la gauche, fait aujourd'hui l'objet : à la pertinence des propositions se substituent les soupçons pesant sur les intentions. La réalité est pourtant là : celle de la cruauté de certaines situations, qui risque d'alimenter une crise de confiance générale dans le bien-fondé de notre société et dans son avenir. Face à l'ampleur de ces problèmes, des procédures nouvelles sont nécessaires, surtout à l'heure où se construit l'Europe politique. Le présent essai, consacré à l'analyse des faits, des idées et des politiques liés au social, voudrait montrer que cette question renvoie aux finalités mêmes de l'action politique.