Les études sociologiques sur les enseignants ne manquent pas. La collection « Pédagogie d'aujourd'hui » en a publié de célèbres. Mais sur les hommes et les femmes qui font exister l'enseignement professionnel, il n'y avait presque rien, bien que cet enseignement soit l'objet d'âpres débats et d'interventions politiques répétées, et qu'il représente près du tiers de l'enseignement du second cycle. À partir d'un échantillon important, ce livre analyse la morphologie sociale des professeurs d'enseignement professionnel, leurs trajectoires, mais aussi le sens qu'ils donnent à leur travail, et les aspects majeurs de leurs pratiques. Un changement en cours, lourd de significations, donnait une certaine urgence à l'enquête rapportée. Le recrutement de diplômés de l'enseignement technique supérieur, se substitue à celui d'une élite d'ouvriers professionnels instituée dans les années 1940. Les pratiques pédagogiques et les contenus enseignés en sont nécessairement transformés. Les savoirs de métiers font place aux savoirs techniques. On constate ainsi, à rencontre de ce qui est généralement dit sur l'inadaptation de cet enseignement, une certaine conjonction entre ces changements didactiques et la demande des entreprises en compétences techniques. Cet ouvrage obéit à un double dessein : faire œuvre de mémoire, en consignant les pratiques et les valeurs de ces anciens ouvriers professionnels, qui ont bâti cet enseignement pendant plus de trente ans ; construire une méthode d'analyse, qui éclaire la nature des institutions par ce que sont - ou deviennent - leurs agents, et qui s'applique aux formes et contenus de cette activité sociale : la formation professionnelle.
