Les errances ne sont pas à la périphérie, mais au cœur de notre être. La santé psychique et l'orientation religieuse se cherchent et s'effectuent en travaillant aussi avec ce qui fait défaut en nous. L'idée d'une santé sans troubles et celle d'une authenticité religieuse sans ombrages, ne sont que des fantasmes d'omnipotence blindée. Reste que, dans les névroses, l'énergie s'épuise et se fige et que la vie religieuse y subit une mutilation. Destinée à sauver l'homme, à promouvoir son intégrité, à libérer ses ressources essentielles, à exhausser son existence, la religion qui s'altère a la dangereuse puissance de confirmer l'homme malade dans son auto-mutilation névrotique. Certes, elle peut aussi lui apporter des forces vives et soutenir une organisation psychique défaillante : nous l'avons également souligné. Ce qui nous intéresse essentiellement, c'est de dégager, sur l'exemple des névroses religieuses, quelques lois universelles de la réalité psychique, d'en connaître les tensions internes, de mettre au jour ses sources conflictuelles. De cette manière, on comprend et on discerne mieux la variabilité, les conflits, les imaginations fallacieuses et les essors renouvelés de la vie religieuse. On peut espérer que l'analyse des représentations inconscientes et des tensions qui ordonnent les péripéties de la vie religieuse, rende plus transparente la trame symbolique des signifiants religieux et qu'elle libère leur pouvoir de libération. D'après le sens originel du mot, en effet, analyser signifie dé-lier, rendre sa fluidité à ce qui s'était figé.