N'est-ce pas le libre-échange qui permet, grâce à la concurrence, en abaissant les prix et en stimulant l'activité économique, d'assurer le plein emploi et la prospérité ? Non, répond Jean-Marcel Jeanneney. Le libre-échange parfait est une utopie et, sous ses formes imparfaites, il est loin d'avoir les vertus qu'on lui prête. Son jeu est d'ailleurs complètement faussé par les multinationales et le désordre monétaire. Au lieu d'aider au développement des pays du tiers monde, il en fait des satellites des pays riches. Il est temps, dit Jean-Marcel Jeanneney, allant à contre-courant, de rendre aux pouvoirs publics une suffisante maîtrise du commerce extérieur, en refusant de s'enfermer dans un nationalisme étroit. Il faut organiser l'avenir communautaire de l'Europe, pour sauver son économie de marché. Il faut la protéger, planifier ses industries lourdes et la doter d'une bonne monnaie, en créant un institut monétaire européen. Cette Europe protectionniste pourrait alors servir de modèle d'organisation aux États d'autres continents, eux aussi désireux d'indépendance. Une thèse neuve, qui gênera plus d'un et ne laissera personne indifférent.