Lord Jim, le premier chef-d'œuvre de Joseph Conrad, paraît en 1900, au début de notre siècle. D'un fait divers de désertion, l'auteur bâtit un roman d'aventures. Mais, au-delà, c'est une plongée éminemment moderne dans les tréfonds d'une conscience tourmentée. Jim, songeur glorieux, s'inscrit dans la lignée d'un Don Quichotte transposé à l'ère coloniale. Incarnation d'une jeunesse mythifiée, à la fois enviable et tristement vulnérable par son idéalisme, il se lance, rongé par la culpabilité, dans des combats douteux contre des réalités sombres : assauts imprévisibles de l'océan, agressions d'une humanité souvent veule ou féroce. Chemin faisant, éclatent les vérités profondes d'un moi reconnaissable : dans sa conscience torturée après la chute, ses espoirs de rachat, sa poursuite noble d'un rêve de pureté. Chacun peut dire que Jim est l'un des nôtres.