Qui n'a pas, un jour ou l'autre, rencontré sa Sylvana Le Pan ? La mienne a débarqué au début de l'été. Elle était belle, déboussolée. Elle avait une revanche à prendre. Apparemment, son mal de vivre nous concernait, son échec aurait pu être le nôtre. Du jour au lendemain, ça a été le branle-bas de combat. Le monde vivait sur un baril de dynamite et c'était nous, à Kalamazoo, qui risquions d'exploser. L'holocauste était dans nos murs. Les chasseurs de têtes. Ceux qui manient la flèche et le curare. Toute la famille y est passée. Sylvana avait décidé d'aller jusqu'au bout. De triompher de ses haines et de ses incohérences. Donc de gagner. Elle chargeait quand même un peu le rôle. En fin de compte, ça été moi, le dindon de la farce. Moi, Zé Cinnamo. Car, négliger ses fictions, ç'aurait été sans doute avouer mes propres défaites. Oublier qui j'étais. Alors je l'ai suivie. À la boucherie. Tête baissée.