Une infime partie de notre patrimoine culturel est parvenue jusqu'à nous, et nous lisons Homère, Virgile, Augustin d'Hippone, sans nous interroger sur la fabuleuse épopée vécue par leurs écrits. Pour les ouvrages qui ont victorieusement surmonté les obstacles du temps, quelle aventure ! et quels risques ont-ils traversés au cours des siècles : fragilité du papyrus, peu à peu remplacé par le parchemin, fatigue et négligence des copistes, usure du papier, manipulé par des générations d'usagers, trahison des clercs, qui se sont permis de toucher au texte pour le modifier, l'abréger, l'augmenter, l'interpoler, l'infléchir... L'invention de l'imprimerie, préparée et facilitée par l'apparition du papier, a modifié en profondeur les conditions de la transmission. Elle n'a pas seulement sauvé du naufrage quantité d'ouvrages, elle a favorisé peu à peu le décapage des textes eux-mêmes, les purifiant des coquilles, fautes, bévues, accumulées par des générations d'intermédiaires, en essayant de remonter le fleuve jusqu'à sa source. Cette histoire du livre se lit comme une extraordinaire odyssée.