Les automobilistes, les musardeurs, et les gens qui marchent à vive allure, ou courent tout au long du quai vers quelque rendez-vous, dans une poursuite imaginaire (on ne sait qui est le poursuivi et le poursuivant : au flanc clair de l'eau, la mort échevelée ?). Les quais sont utiles. Comme de mainte chose de l'industrie humaine ou de la création naturelle, comme de tous les lieux de passage (non seulement au sens de mouvement dans le temps et l'espace : seuil d'une découverte, d'une initiation), l'usage des quais, en éludant l'attention à leur réalité affranchie d'emploi et de destination, en efface la vue et, plus encore, le recul réflexif. Et, scrutant plus avant la grande barge bleu-azur, la berge pierreuse, la forme des quais est-elle détachable de son exercice, de sa fonction, de sa jouissance, de son sens ? À l'écart de tout dogme, on peut se demander si le fait qu'ils servent, leur donne aussi ce caractère esthétique, voire spirituel par le détour de l'allure, médiocre dans notre regard.