Le problème, que le R.P. Barjon aborde dans cet ouvrage, est important, car s’il est plus facile à saisir à travers la lentille grossissante du théâtre et du livre contemporains, il reste cependant un problème actuel, avant tout philosophique et social, dont la littérature ne reflète que les données, comme un miroir souvent déformant. Ces données sont diverses : les uns proclament avec Nietzsche « Dieu est mort » ; d’autres gardent la nostalgie d’une « absence » qui les révolte ; d’autres enfin écoutent et comprennent ce « silence ». L’auteur cherche une solution. Où la trouver ? Chez ceux qui blasphèment ? Sartre, Cocteau dans Bacchus, Thierry Maulnier dans Le profanateur ? Mais les blasphèmes contre un Dieu « qui n’existe pas » n’ont pas de sens, et ne révèlent qu’un orgueil amer et impuissant. Chez ceux qui désespèrent ? Mais que ce soit chez Faulkner, surtout dans Absalon, Absalon ! analysé ici avec une lucidité et un sens philosophique profonds ; que ce soit dans le poignant « journal » de Paule Régnier, qui avait peut-être trouvé Dieu et n’a pas su le reconnaître ; que ce soit dans l’œuvre désabusée de Van der Meersch, l’ombre divine est là, on la devine, on la sent, et c’est le drame de ces écrivains de rôder et d’avoir rôdé autour de Dieu sans l’atteindre. Restent ceux qui « auscultent le silence ». Le R.P. Barjon en choisit trois, les plus attentifs, les plus exaltants aussi : Bernanos, Claudel, Patrice de La Tour du Pin. Tous les trois ont entendu la parole qui chuchote dans le « château de l’âme », ils l’ont comprise et, parce qu’ils l’ont aimée, ils ont déchiré le silence et laissé parler la grande Voix. D’autres aussi l’ont entendue, mais étouffée sous leur pauvre verbiage d’hommes ; et Dieu, latent, reste absent de leur œuvre. Non, Dieu ne se tait pas ; encore faut-il savoir l’écouter. Humblement.